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Inès Desnot

Commerces écoresponsables : le vert à moitié plein

Dernière mise à jour : 19 févr.

Tels des saules, les commerces écoresponsables poussent à tout va dans la Ville rose, parsemant le paysage urbain de notes de vert. Boudu est allé à la rencontre de certains d’entre eux, tous domaines confondus, afin de comprendre comment se manifeste l’écoresponsabilité dans leurs professions.



Partout en France, l’écologie vit son heure de gloire. Bien sûr, Toulouse n’est pas en reste. La Ville rose voit éclore fleuristes, restaurants, épiceries, pressings, et boutiques écoresponsables en tous genres. Au-delà du postulat environnemental funeste dépeint par les scientifiques, deux questions s’imposent. Qu’est-ce que l’écoresponsabilité ? Et comment peut-elle se manifester dans autant de domaines ? S’il y a un point sur lequel la plupart des commerçants rencontrés se rejoignent, c’est bien leur connaissance des problèmes environnementaux engendrés par nos modes de consommations modernes. La recherche spontanée d’alternatives écoresponsables n’a fait qu’en découler. En suit presque inévitablement la volonté d’investir ces savoirs dans leur travail.

Côté investissement, Alexis Pargeois, chef du restaurant Popotes, cantine respectueuse, n’est pas en reste. Il cherche à vivre dans l’autosuffisance, et depuis 5 ans, tend à être le plus respectueux de l’environnement possible. Son éducation sur le sujet est donc chevronnée. C’est la raison pour laquelle Kévin Aroule l’a choisi pour chapeauter la cuisine. Il s’assure alors d’avoir un connaisseur honnête dans sa démarche aux commandes. Pour Andrea Salvi, propriétaire de la boutique de bien-être La Mistinguette en Salopette, il est aussi question de rester averti. Ne pas tomber dans les antres du greenwashing est devenu une de ses priorités. Être bien informée lui permet de choisir les produits les plus éthiques possibles : « Certaines boutiques choisissent les mêmes articles, piochent dans le catalogue Ecodis sans s’attarder sur la réelle qualité écologique du produit ni même sur la question du transport » regrette-t-elle.


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V comme voyage Le transport semble occuper une place clé dans les pratiques écoresponsables, de par les émissions de CO2 engendrées. Chez Jungle Utopia, fleuriste, on privilégie par exemple les fleurs du Var ou de Montauban. Aussi dans un souci de traçabilité, entre 60 et 80 % des fleurs du magasin sont françaises selon Alice Arangayen, cheffe de la Jungle. « Nous évitons de nous fournir en Afrique où l’éthique environnementale et humaine n’est pas au rendez-vous, mais nous avons encore des fleurs d’Italie ou de Hollande, certaines variétés n’étant pas trouvables en France », nuance la commerçante. Même difficulté chez Popotes, pour des produits comme l’avocat ou l’ananas. Le restaurant favorise globalement les produits français et locaux afin de minimiser les voyages et de valoriser les circuits courts. Ce qui ne semble pas être une mince affaire pour une partie de leurs victuailles, notamment le poisson. Un critère de localité auquel les consommateurs semblent devenir plus attentifs, à en croire la créatrice de la boutique de Lou Monjon dédiée aux jouets et vêtements pour enfants : « La transparence est importante pour moi. Je n’hésite pas à prévenir lorsqu’un article n’est pas fait en France. Même si cela a pu faire reculer certains clients », raconte cette ancienne juriste qui propose de la seconde main pour pallier ce problème. Notamment face aux difficultés liées à la fabrication en elle-même, et au lieu de production.

En plus d’être tendance, le vintage vit donc de nouvelles heures de gloire grâce à son aspect écoresponsable. à La porte bleue, friperie fraîchement ouverte à Toulouse, on l’a bien compris. Ange Minkala, fripière, et Claudine Andrieux, spécialisée dans l’upcycling, proposent deux types d’offres en boutique : les vêtements chinés par l’un, et les pièces recousues et/ou décorées par l’autre. « Notre objectif est de mettre en avant les trésors oubliés dans nos placards, tout en sensibilisant à l’achat de seconde main. Il faut contrer l’industrie de la mode, trop polluante ». Tous les meubles du magasin ont eux aussi eu une première vie. Bonus, ils sont disponibles à la vente. L’activité principale reste pour autant l’habillement, jonglant entre les genres. Blazer Versace vintage au bleu de travail upcyclé, la variété des styles est aussi plaisante que déroutante.


Ange Minkala, fripière La porte bleue

« Notre objectif est de mettre en avant les trésors oubliés dans nos placards… Il faut contrer l’industrie de la mode, trop polluante » Ange Minkala, fripière La porte bleue


L’obsolescence obsolète Ce ne sont pas les seuls à miser sur de l’upcycling. Chez Sequoia Pressing, où le nettoyage se fait à sec, Thomas Garel recherche une couturière dans le but de proposer un nouveau service de reprise des vêtements abîmés, histoire de faire un pied de nez à la surconsommation textile. En attendant, Thomas Garel s’attache à faire dans le recyclage en triant minutieusement ses déchets et en privilégiant le matériel en plastique recyclé. « Nous vivons tous sur la même planète, autant en prendre soin ».


La mistinguette en salopette

Eugène Poubelle tomberait des nues Malgré tout, mieux que de recycler leurs déchets, certains les suppriment. À la tête de Ceci & cela, épicerie précurseure dans le zéro déchet, Marie Guillemenot combat le plastique et les emballages superflus depuis 5 ans. Avec une rhétorique indémontable : « Nous sommes dans le respect des sols avec le bio. Dans la diminution de la pollution atmosphérique avec le local. Et dans la réduction des déchets avec le vrac ». Autant d’éléments écoresponsables incontestables. Les bacs contenant les denrées sont en revanche issus du catalogue Ecodis, seul acteur français du domaine à déployer une offre écoresponsable à grande échelle.

Un opérateur qui ne trouve pas grâce aux yeux d’Andrea Salvi de La Mistinguette qui s’inscrit elle aussi dans la vague du zéro déchet. « Avant de mettre un article en boutique, nous vérifions que tout a été pensé de manière à réduire la pollution ». Absolument tout ? Flacons à savon en verre, après-shampooing solides, huiles essentielles bios… Son offre est effectivement riche en alternatives vertes aux objets et produits du quotidien. Très exigeante lors de la sélection de ses articles, elle va même jusqu’à afficher le cahier des charges des différentes certifications : « Parce qu’il n’y a besoin, par exemple, que de 10 % de bio dans la composition globale pour obtenir le label Ecocert » s’indigne-t-elle. Mais si les labels ne font pas l’unanimité du côté des commerçants, ils n’en demeurent pas moins rassurants pour la clientèle. Or le coût lié à l’obtention de cet élément officiel peut en refroidir certains comme Alice Arangayen qui ne ferait pas cadeau de milliers de roses pour une étiquette. « Nos habitués savent comment nous travaillons » se persuade-t-elle. Bénéficiant des avantages d’être franchisé, Thomas Garel et son pressing disposent eux, non pas d’une certification, mais d’un brevet dénommé Greenearth. Il atteste du « respect de l’Homme, de la planète, et des vêtements » grâce à sa technologie au silicone, économe en eau. Que cela coule de source ou soit arrivé de manière fortuite, l’écoresponsabilité a le vent en poupe. Mais sans instance supérieure pour l’encadrer, la définition reste tributaire de notre libre interprétation

Après les flots, la déco


Le comptoir de java

Spécialisé dans l’ameublement et la décoration asiatiques, Guy Bacalou du Comptoir de Java se fournit principalement en Inde et en Chine. Si les meubles anciens chinois font partie de son offre depuis ses débuts, c’est en Inde que son cheminement vers l’upcycling a débuté. Après le tsunami de décembre 2004 qui a frappé le sud du pays, les bateaux fracassés par les vagues sont devenus source de bois de récupération. Les usines ont alors pris le train en marche en fabriquant des meubles à partir de cette matière première, alimentées par les récupérateurs locaux. Séduit, le brocanteur a élargi son offre de meubles. Pas à pas, il s’est également mis à proposer de l’encens bio, des coussins de yoga rembourrés à l’épeautre bio, des tentures colorées à la peinture végétale appliquée au tampon… « Je ne peux pas faire de grosses commandes car j’ai un petit magasin, je n’ai donc jamais eu la haute main sur les meubles neufs, c’est ainsi que je suis écoresponsable » explique Guy Bacalou. Même si ses articles traversent les océans en conteneurs, et que la visibilité sur les conditions de travail et, de son propre aveu, limitée…

Le dico écolo

Écoresponsable (n.m) : qui cherche à intégrer des mesures de protection de l’environnement dans ses activités, ses principes, etc.


Seconde main (n.f) : La seconde main, comme son nom l’indique, implique de donner une seconde vie à certains objets, les plaçant plus haut dans la pyramide de la consommation qu’au stade de déchet.


Upcycling (n.m) : Fait de requalifier un vieil objet au stade de neuf par sa remise au goût du jour et/ou sa réparation.


Traçabilité (n.f) : Capacité de suivi d’un article de sa fabrication à sa commercialisation impliquant la transparence des différents acteurs liés à sa production et à son transport.


Zéro déchet (n.m) : Mode de consommation dont l’objectif est de réduire au maximum notre production de déchet, notamment via des emballages réutilisables ou biodégradables.


Greenwashing (n.m) : Technique marketing qui consiste à surfer sur l’argument écologique pour se mettre en valeur, sans forcément être en accord avec cette idéologie dans la pratique.


Circuit court (n.m) : Vente ne comprenant aucun ou bien un unique intermédiaire entre le producteur et le commerçant.


Consommacteur (n.m) : Se dit d’un consommateur lorsqu’il se tourne vers des achats incarnant une lutte, révélant une prise de conscience.

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