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BOUDU

L’autre maire de Paris – Gérard Brion

À le voir défiler au milieu de sa Tour Eiffel et de ses Champs-élysées, on confondrait aisément Gérard Brion avec Gulliver sur l’île de Lilliput. Et pourtant, quand cet homme de 50 ans se balade au milieu des immeubles haussmanniens de son Petit-Paris, c’est avec des yeux d’enfants qu’il contemple son œuvre. Ce Charentais a fait de Vaïssac, petite commune de moins de 1 000 habitants surplombant les Gorges de l’Aveyron, un haut lieu du tourisme en Tarn-et-Garonne. Il faut dire que sa reproduction de Paris, d’un mimétisme poussé à l’extrême, attire chaque mois plusieurs centaines de curieux. Cette prouesse, c’est à Michel Drucker qu’on la doit. Si à première vue, le lien entre ce parc à thème et l’inamovible présentateur ne saute pas aux yeux, c’est pourtant grâce à un de ses programmes que Gérard Brion décide de se lancer dans ce projet fou : « Je devais avoir 12 ans, et j’avais une passion pour le dessin, l’architecture et le chant. Un soir, je regardais l’émission Champs-élysées de Michel Drucker. J’ai construit ma propre Tour Eiffel et un petit décor de scène pour pouvoir y chanter avec mes petites nièces » se souvient-il avec émotion. Très vite, cet enfant solitaire se jette corps et âme dans la réalisation de son Petit Paris, qui va nécessiter plus de 5 000 heures de calcul. Après avoir financé ses premiers sacs de ciment en refourguant des kilos de truffes au restaurant du village, l’adolescent confectionne lui-même ces maquettes, dans des blocs de béton cellulaire, en reproduisant les perspectives de la Capitale dans son petit jardin : « À l’école et au collège, j’étais tout le temps fourré à la bibliothèque à dessiner des plans et reproduire des photos que je trouvais dans les magazines, comme celles de Yann Arthus Bertrand, avec Paris vu du ciel. C’était essentiel pour retranscrire les courbes, la forme des immeubles. Je voulais que tout soit parfait ». Un sens du détail déroutant, alors que le jeune homme n’a encore jamais mis les pieds à Paris. Pourtant, son « jouet » peine à susciter l’intérêt, sa famille n’y voyant qu’un passe-temps encombrant le jardin, alors que « l’autre maire de Paris » (comme il aime se surnommer) a quitté le Tarn-et-Garonne pour poursuivre ses études. Ses talents de modélisation alertent pourtant Gérard Royal, frère de Ségolène, lieutenant-colonel dans les services de renseignements. Le jeune homme se retrouve engagé dans l’armée, pour des tâches pour le moins singulières : « Ils ont vu que j’avais un très bon sens de l’observation, que je pouvais rentrer dans un bâtiment et en retenir la structure, donc j’ai eu des missions un peu partout dans le monde, comme dessiner les plans d’une base secrète d’après une photo satellite. » Après quelques années de service, l’artiste renoue avec ses premiers amours, dans un parc à thème situé à Brignoles, dans le Var. Et alors qu’il semble condamné, son Petit Paris est sauvé en 1997, après un tragique accident : « Quand Lady Di s’est tuée à Paris, les curieux qui connaissaient l’existence du parc venaient en pèlerinage pour chercher le pont de l’Alma. Mes parents étaient harcelés, ils en avaient par-dessus la tête. Tout le monde leur demandait : « Mais où est la Mercedes ? ». Alors j’ai pris le modèle en miniature, je l’ai écrasé à coups de marteau et je l’ai mis sous le pont. L’Agence France Presse l’a su, et j’ai reçu tous les journaux de France et de l’étranger ». Gérard Brion quitte son travail pour revenir à Vaïssac accueillir les visiteurs. Un pari réussi – il vit désormais des revenus générés par le parc – mais qui a failli tourner court. En 2001, le parc, en plein essor, est proche de quitter Vaïssac pour… Las Vegas. Le Tarn-et-Garonnais est approché par Line Renaud, après l’intervention du couple Chirac. L’actrice parraine le projet de construction d’un hôtel Hilton dans la ville du péché, et veut y installer la reproduction de Paris. Mais une autre tragédie, l’attentat des tours jumelles, la même année met fin aux discussions. Si le parc à thème a souvent été proche de quitter la petite commune du Tarn-et-Garonne, c’est que son propriétaire ne s’y sens pas franchement en odeur de sainteté. Gérard Brion doit faire face à l’hostilité du maire et du voisinage, qui se plaignent des nuisances engendrées par le Petit Paris. Des dizaines de touristes à Vaïssac, cela peut vite créer la confusion. Une défiance qu’il a du mal à supporter : « Ici, du moment que vous ne faites pas comme tout le monde, cela dérange. Pourtant, ce n’est pas une discothèque, c’est familial. Le maire a convaincu un autre agriculteur de vendre le chemin communal, pour empêcher les cars de touristes de passer. J’ai eu pendant trois mois un blocus avec des bennes en acier pour empêcher les gens de se garer. J’ai l’impression d’être marginalisé ici à Vaïssac. » Aussi le quinquagénaire envisage-t-il de déménager… et de rapprocher, pourquoi pas, le Petit Paris du grand

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