Le mot de Jacques Chirac en visite en Corrèze en 1992 : « C’est beau, mais c’est loin », a un équivalent napoléonien. Devant le Capitole, l’Empereur déçu a lâché un « C’est beau, mais c’est bas » un peu vexant. C’est heureusement l’unique vacherie impériale dont Toulouse aura à se plaindre au cours de cette visite du 25 au 28 juillet 1808. Le séjour fut une idylle. L’Empire était en paix, Napoléon auréolé de ses victoires, et la population toulousaine encline à acclamer celui qu’elle tenait jusqu’alors pour un usurpateur. Arrivé d’Auch par la Patte-d’Oie où un arc de triomphe orné de têtes de lions a été dressé, le couple impérial refuse de loger au Capitole. Napoléon et Joséphine dorment et dînent donc place Saint-Étienne à la préfecture. Chaque matin à l’aube, Napoléon sort à cheval dans les rues aux murs maquillés à la hâte pour cacher la misère. Il visite la fonderie, le Bazacle, le Canal, les casernes et contemple la lumière d’été sur la Garonne. En trois jours, il reçoit tout ce que la cité compte de notables, de représentants et d’élus. Commerce, Agriculture, Armée, Industrie, tout y passe. Les journées de Joséphine sont moins pénibles. Elle cause botanique au Jardin des Plantes avec le naturaliste toulousain Picot-de-Lapeyrouse qui inaugure son titre de baron d’Empire. Après quelques pas de danse exécutés dans un Capitole refait du sol au plafond, puis une démonstration de joutes nautiques, Napoléon signe un décret qui accorde à Toulouse tout un tas de largesses : financement du prolongement du quai de la Daurade, rénovation de Saint-Cyprien, installation de fontaines publiques, création du théâtre du Capitole, de l’école vétérinaire, 15 000 francs pour l’autel de la cathédrale, 20 000 francs pour les pauvres, 56 000 francs pour la municipalité, et don à la Ville de propriétés de l’État (Observatoire, bibliothèque, terrains etc.) qui s’ajoutent aux 40 œuvres offertes entre 1805 et 1811 à l’actuel musée des Augustins. Le 28 juillet, Napoléon et Joséphine quittent Toulouse en direction de Montauban. Et n’y reviendront pas.