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Politique du bien manger – Jean-Jacques Bolzan

Dernière mise à jour : 11 janv.

À Bordeaux, les choses de la table sont gérées par l’adjointe à « la résilience alimentaire ». À Montpellier, par l’adjointe à la « politique alimentaire et à la bio-alimentation ». À Toulouse, elle est du ressort de Jean-Jacques Bolzan, adjoint au « bien manger ». Les intitulés en disent long, et l’élu nous a dit le reste. 



D’où vient cet intitulé ? 

C’est le maire qui en a eu l’idée. On n’a pas eu besoin de boîte de com’. Bien manger, ça dit bien les choses, mais ne vous méprenez pas. Ça sonne sympa, sud-ouest; ça sent les copains, les tablées et les coups à boire, mais il y a derrière une véritable stratégie et un engagement total.

Qui accomplissait jusqu’alors vos missions actuelles ? 

Elles étaient éparpillées dans d’autres délégations. Le service agriculture et alimentation faisait partie de la délégation de l’environnement. Aujourd’hui, le bien manger regroupe la cuisine centrale, les marchés et le domaine de Candie. C’est une délégation en or ! Il y a énormément de boulot, mais on se régale. 

Quelles sont ces missions ? 

D’abord travailler sur la structuration de filières pour que les gens d’ici aient accès à une alimentation saine, durable et de proximité. Garder ensuite en tête la question de la santé et des vertus des habitudes alimentaires du Sud-Ouest (nous travaillons avec la fédération de cardiologie). Penser ensuite à apporter du plaisir dans l’assiette, ce qui est primordial dans la vie. 

Vaste programme ! 

Effectivement. C’est facile de faire des phrases et de dire aux gens de manger local et durable. Encore faut-il structurer l’offre. C’est ce que je m’efforce de faire en initiant des rapprochements ente la cuisine centrale, les restaurants, les commerces d’un côté, et les agriculteurs et les grossistes de l’autre. C’est intéressant à l’échelle de Toulouse parce que les volumes sont importants. 

Pouvez-vous nous donner un ordre d’idée ? 

La restauration collective à Toulouse, c’est 34 000 repas par jour. Pour alimenter la cuisine centrale en veau sous la mère, par exemple, il a fallu réunir 80 producteurs du Gers qui se sont regroupés pour répondre à notre appel d’offres. Cela représente 600 000 euros pour les familles du Gers, et cela contribue à maintenir l’activité de l’abattoir.

Ces volumes ne risquent-ils pas de ne profiter qu’aux grandes exploitations et de laisser sur le carreau les fermes plus modestes ? 

Il faut que chacun puisse maintenir le modèle qu’il a choisi et puisse vivre de son travail comme il l’entend. Il y a les marchés, les restaurants, la cuisine centrale… toutes les échelles sont possibles. Je fais le tour des territoires pour dire aux paysans qu’on a des restos, des marchés et de la restauration collective à Toulouse, et qu’il y a de la place pour tout le monde, même pour les petits ! On trouve des solutions quand on les cherche, même auprès de la grande distribution. 

C’est-à-dire ? 

On va signer une charte avec Carrefour pour que la Métropole soit la porte d’entrée pour tous les paysans des environs, et éviter que seuls les gros s’en sortent. En fonction de la capacité de production de livraison, on les aiguillera vers les petits Carrefour city, les surfaces moyennes, ou vers les hypermarchés. 

Comment expliquer que le lien naturel entre les producteurs locaux et les commerçants du coin se soit rompu par le passé ? 

À chaque époque ses préoccupations. C’est vrai que beaucoup de restaurateurs, dans les décennies précédentes, ont cédé à la facilité et fermé les yeux sur l’origine des produits. C’est vrai aussi que les agriculteurs ont été pris, souvent à leurs dépens, au jeu de la grande distribution. Mais tout cela évolue. Les acteurs changent de point de vue. Ils n’ont pas attendu Bolzan pour s’y mettre. 

Vous êtes optimistes ? 

Oui ! Les gens reviennent au local, même les jeunes… surtout les jeunes ! Même si pour ces derniers, la question de l’accessibilité aux bons produits se pose parce qu’ils sont parfois chers. Mais dans cette période d’inflation, c’est de moins en moins vrai. Et puis c’est une question d’éducation : le frais peut paraître plus cher à l’achat mais le rapport qualité-prix est excellent. II revient finalement moins cher que la nourriture ultra-transformée. Donc je suis optimiste, mais je ne baisse pas la garde parce que je vois poindre la menace de la nourriture standardisée et aseptisée. C’est un risque pour Toulosue. 

Pourquoi davantage à Toulouse qu’ailleurs ? 

On a un tel afflux de population du nord de la France et de l’étranger, ce qui est formidable par ailleurs pour le développement de la ville, que notre identité gastronomique commence à être sérieusement diluée. Et ça, ça m’inquiète. Il faut raviver la flamme des produits et des plats traditionnels de notre région. 

Comment mesurez-vous cette « dilution » ? 

Partout et tous les jours. Quand j’entends les gens parler dans des colloques ou les réunions, j’ai l’impression qu’il y a un grand mouvement vers l’aseptisation de la nourriture. Dans ma vie d’élu, je sens vaciller les gens, sous l’influence d’associations ultra-militantes souvent financées par les États-Unis.

Le remède ? 

Arrêter l’agri-bashing et les raccourcis idéologiques sur l’alimentation, et avoir confiance en nous. Le Sud-Ouest est attrayant par son climat, sa nature, son économie, son tempérament. Il doit rester un lieu de résistance à l’aseptisation et à la standardisation. 

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