Les sept DJ du collectif S.oror animent les nuits toulousaines au rythme de leur mix,bien décidées à faire bouger les fans de musiques électroniques… et les line-up.
Il y a deux ans, sur la piste du Cri de la Mouette, Eloïse (alias Ilusión) et Louise s’ambiancent face aux DJ. Ce soir-là, il n’y a que des femmes derrière les platines. « J’aimerais trop avoir un collectif comme ça, qu’avec des meufs » lâche Louise. Ça tombe bien : Eloïse est sur le point d’en fonder un avec des amies. Dans leur entourage, les amateurs d’électro sont majoritairement des hommes. « Comme ils ne nous faisaient pas de place, on a décidé de s’en faire ! » raconte Asfar, membre du collectif. Une semaine après avoir lancé leur compte Instagram, Snail, Asfar, Ilusión, Pussy Sound Like, Leo, Lullaby et MZR, les sept DJ de S.oror sont contactées et se voient proposer une première date au Levrette Café. Elles connaissent bien le milieu de l’electro. Elles baignent dedans depuis des années. Asfar a commencé à en écouter au lycée à Rabat : « La première fois que je suis tombée amoureuse de ce style, c’est en allant au festival Mawazine voir des DJ stars comme Avicii, David Guetta, que je n’écoute d’ailleurs plus du tout aujourd’hui. » Dans le groupe, elles ont toutes leur spécialité, tekno, 4:4, drum and bass, trance… « Au-delà de l’aspect mécanique, dans la musique électronique, peu importe le style dans lequel tu aimes naviguer, il y a une liberté folle. » s’emballe Eloïse.« Dans la free, il y a encore l’envie de s’émanciper des clubs et de l’argent. Les gens viennent gratuitement, ils profitent de la nature, d’un moment et le lendemain, ils remballent et se cassent. »
Impossible pour elles de ne pas revendiquer leur statut de femmes DJ quand de nombreuses line-up sont encore exclusivement masculines : « En soirée, on a envie que la scène ressemble à la foule, et ce n’est pas encore le cas partout. Dans un monde patriarcal, si tu n’es pas contre ce système, tu es dedans. Le travail des “programmateurices” , c’est justement de faire l’effort d’aller chercher des femmes. » Asfar soulève aussi le problème de la représentation équitable : « Quand on booke des meufs, en général, on les met en début de soirée, en warm up. C’est mignon, mais si tu es là à 18 heures et que les gens arrivent à 22 heures, ce n’est pas intéressant. Si tu fais une programmation paritaire, mais que tu mets les meufs sur les pires créneaux, où on ne les verra jamais et bien ça n’arrangera rien à la visibilité. » Pour y remédier, S.oror s’est associée au média toulousain Effet Tunnel pour créer un annuaire de femmes artistes et de « minorités de genre » de la scène électro locale. Bientôt en ligne, et déjà riche d’une centaine de références.